vendredi 19 juin 2009

Les infirmières à l’honneur !

Deux séries télévisées ayant pour personnages principaux des infirmières débarquent ce printemps sur nos écrans. Il s’agit de « Nurse Jackie » et de « HawthoRNe » : deux shows aux antipodes, qui suscitent déjà de vives réactions au sein de la profession infirmière aux Etats-Unis.

«Nurse Jackie» est jouée par Edie Falco, connue pour son rôle dans la série sur la mafia italienne « Les sopranos ». La série dépeint une infirmière qui travaille aux Urgences ayant pour but de soigner le mieux possible ces patients tout en étant une sorte de justicière. Elle enfreint allègrement les règles de l’hôpital afin de faire le bien auprès des personnes en difficulté et n’hésite pas à donner des soins pour le moins inappropriés à ceux qui, selon elle, ne le méritent pas. Nurse Jackie souffre également de problèmes de dos et se drogue aux percocets (médicaments anti-douleur) qu’elle obtient par le pharmacien et les absorbe avec une manière bien à elle ! En tous cas, la partie qu’on peut voir gratuitement sur le site de Showtime m’a bien fait rire mais a suscité pas mal de critiques dans le milieu infirmier. De nombreuses infirmières et associations se sont fait entendre pour que ce show soit retiré car elles estiment qu’il nuit à l’image de notre profession. Je pense pourtant que la plupart des spectateurs ne sont pas stupides au point de croire que cela se passe dans la réalité (enfin, pas tout quoi !). Cette série passe malheureusement sur une chaîne privée et il faut débourser quelques dollars pour y avoir accès.

« HawthoRNe » fait plutôt penser à un remix d’« Urgences » avec comme personnages principaux des infirmières plutôt que des médecins. On retrouve la même trame d’histoires personnelles mêlées au quotidien des infirmières. Le personnage principal, joué par Jada Pinkett Smith (la femme de Will Smith), est Christina HawthoRNe, la directrice des soins infirmiers de Richmond Trinity Hospital. Pour ceux qui ne le savent pas, RN sont les initiales désignant notre statut de Registered Nurse (équivalent de l’abréviation IDE). C’est le côté héroïque des infirmières qui est mis en avant dans cette série, Christina se trouvant le même jour en réunion administrative, au chevet de cinq patients et posant une intraveineuse à un nourrisson. Les relations avec les médecins sont malheureusement montrées sous l’angle du conflit et de la domination. Ce sera peut-être la série qui remplacera le vide laissé par « Urgences ».

Quelle que soit l’approche de ces séries sur le monde infirmier, il était temps qu’on nous mette a l’honneur !

Nurse Jackie :
http://www.youtube.com/watch?v=FGyWMdCWUrc

HawthoRNe :
http://www.tnt.tv/dramavision/?cid=48487

vendredi 12 juin 2009

Hygiène 1ère partie : les uniformes

Appelés plus communément ici « scrubs » ou encore « pajamas », les uniformes se portent non seulement dans l'hôpital mais aussi à l'extérieur, comme dans les séries télévisées. Ne cherchez pas les caméras si vous êtes en visite à New York et que vous croisez quelqu'un en uniforme dans la rue ! Pratique choquante pour moi qui, lors de mes nombreux stages d’école d’infirmière, devais me changer même pour aller manger à la cafétéria. Ici, la plupart de mes collègues arrivent en scrubs au travail, après s’être habillés à la maison, puis repartent le soir sans se changer. Je suis une des seules infirmières à apporter mes tenues avec moi et à me changer dans l’unité. J’ai pourtant assez rapidement compris que rien n’était aménagé pour qu’on puisse se changer sur place. Pendant longtemps je me suis changée dans les toilettes en tentant des numéros d’équilibriste improbables pour que ni mes vêtements, ni mes tenues ne touchent le sol. Puis récemment, on nous a aménagé une pièce avec des casiers faisant office de vestiaire. Le seul petit problème est la température de cette pièce qui est proche de zéro, de quoi en décourager plus d’un ! Un des avantages certain de mettre sa tenue au saut du lit est le gain de temps et, pour des New-yorkais pressés, le temps n’a pas de prix. Certaines de mes collègues portent même leurs scrubs pour aller faire leurs courses les jours où elles ne travaillent pas !

Pourtant, de nombreuses études démontrent que nos uniformes sont des vecteurs d’infections. A l’automne dernier, le New York Times publiait un article intitulé : « The doctor’s hands are germ-free. The scrubs too ? » (Les mains des médecins n’ont pas de bactéries. Leurs uniformes non plus ?). Certains chiffres sont particulièrement effrayants. Une comparaison de la présence d’agents pathogènes sur les cravates portées par les médecins et celles des agents de sécurité à l’hôpital est faite : 50% des cravates de médecins étaient contaminées contre 10% seulement pour les agents de sécurité. L’auteur pointe également du doigt le fait qu’en Europe les uniformes sont généralement pourvus et entretenus par l’hôpital, alors qu’aux Etats-Unis tout est laissé à la charge de l’employé. Effectivement, j’ai dû acheter moi-même mes tenues et c’est moi qui me charge de leur entretien. Les règles concernant la tenue vestimentaire sont assez floues. D’ailleurs, la majorité des hôpitaux ne donnent aucune directive particulière en la matière. Chacun achète la couleur, la forme d’uniforme qui lui plaît. Certains portent même de simples tee-shirts !

L’article du New York Times donne par ailleurs l’exemple du Danemark, où les règles d’hygiène sont plus strictes notamment au niveau des tenues. Dans ce pays, moins de 1% des infections à staphylocoques sont des infections à bactéries résistantes contre plus de 50 % dans certains hôpitaux américains. L’auteur met en avant les budgets serrés des hôpitaux ou le manque de place pour des machines d’entretien. Il me semble tout de même que les frais engendrés par les infections nosocomiales, qui ne sont désormais plus remboursées par l’Etat mais à la charge de l’hôpital, devraient faire réfléchir l’administration…

Pour ne rien arranger, certains Américains, telle l’infirmière chargée de la lutte contre les infections nosocomiales dans mon hôpital, ont une fâcheuse tendance à considérer qu’aucune pratique venant de l’étranger ne peut être supérieure à ce qui se fait aux Etats-Unis. Pas facile d’établir un dialogue et de faire évoluer les mentalités dans ces conditions ! Ils auraient pourtant beaucoup à apprendre du système français où l’hygiène est le pilier de notre pratique quotidienne.

dimanche 7 juin 2009

Sang pour sang

Aujourd’hui, j’ai transfusé une poche de sang à un de mes patients. Sa femme m’a interpellée pour me poser une question. Elle a commencé par me dire qu’elle avait donné son sang pendant de nombreuses années et, bien sûr, qu’elle avait fait cela de manière volontaire. Aux Etats-Unis comme en France, le don du sang n’est pas rémunéré. Après avoir tourné un petit moment autour du pot, en me demandant de quel type sanguin était son mari et m’avoir fait remarqué qu’elle avait le même, elle m’a enfin posé sa question : était-il possible qu’elle fasse don de son sang à notre hôpital pour éviter qu’on ne leur facture la poche de sang transfusée à son mari ? J’ai mis quelques secondes à répondre en reformulant la question pour m’assurer d’avoir bien compris… Je précise que ce patient est couvert par une assurance mais qu’une partie des frais n’est probablement pas couverte.
Après m’être renseignée auprès de l’infirmière référente, je lui ai répondu que ce n’était pas possible.
Cette question m’a laissée perplexe. C’est malheureux que dans une société aussi développée on en réduise la population à faire « l’aumône » pour sa santé.